vendredi 16 août 2013
L'islam n'est pas réformable, n'en déplaise à Daniel Pipes.
Etonnant de la part de Daniel Pipes: sa dernière chronique: l'islam est-t-il réformable ressemble à un plaidoyer pour le coran et la charia.
Ayaan Hirsi Alia dit que le coran n'est pas réformable, elle a bien raison, elle connait certainement très bien l'islam.
Première erreur de Daniel Pipes: il met au même niveau le coran et les hadiths. Or, les 2 n'ont rien de semblable pour les musulmans: le coran est la parole incréée d'Allah, donc on ne peut rien y changer sous peine d'hérésie. Pas même un signe diacritique, pourtant ces signes ont été placés bien après la mort de Mahomet. Quant aux hadiths, certains ulémas n'en tiennent pas compte et les rejettent en bloc, y compris les "sahih" (sains), ceux de Muslmi, al-Bukhari, abu Daoud, at-Tirmidhi et d'autres. C'est le cas du Tunisien Mohammed Talbi, un des plus grands ulémas de l'ère moderne.
Ensuite, chaque mot du coran a déja fait l'objet d'études approfondies depuis des siècles et il y a donc bien une manière de comprendre chacun de ses versets.
Daniel Pipes parle d'abstraction de la nature humaine et de l'ignorance de plus d'un millénaire de changements concrets: il n'y a eu aucun changement touchant le contenu du coran, et ce depuis sa toute première compilation faite à la demande du calife Othmane.
Les coranistes ont eu des divergences sur l'interprétation de quelques passages non significatifs, mais c'est du passé bien révolu: les portes de l'Ijtihad ont définitivement été fermées au début du 13ème siècle, les musulmans sont aujourd'hui dans le Taqlid, l'imitation des faits et gestes de Mahomet.
Par ailleurs, il aurait dû savoir que le verset cité "pas de contrainte en religion" est un des nombreux verset abrogés ( mansukh ) par le verset 9:73, dit verset du sabre (ayat as-sseif), suivant le principe bien connu des musulmans:
" Ô Prophète, lutte contre les mécréants et les hypocrites, et sois rude avec eux ; l'Enfer sera leur refuge, et quelle mauvaise destination! "
Ensuite, l'auteur demande de ne pas se focaliser sur les seuls textes sacrés. Comment est-ce possible? Le coran est central, il règle tout de la vie des musulmans, la parole d'Allah. La stricte observance de ses lois conditionne l'entrée des musulmans dans leur paradis.
Quant à "l'excellence de la civilisation islamique médiévale", Daniel Pipes participe, volontairement ou non, au mythe soigneusement entretenu sur les bienfaits apportés par l'islam au reste du monde. Je passe sur les prétendues inventions musulmanes, qui pour la plupart sont dues à d'autres civilisations pour ne retenir que le règne musulman sur l'Espagne, prétendument bénéfique et civilisateur, idéalisé et présenté comme une grande période de tolérance. Pourtant, la réalité est tout autre, al-Andalous est bien un mythe en partie fabriqué.
Puis, dans le chapitre qu'il intitule "La synthèse médiévale", il revient sur cette période de l'histoire de l'islam qui est aujourd'hui totalement révolue, ce qui est convenu de la part de la très grande majorité des ulémas. L'Ijtihad est bien terminé. Mais on pourrait supposer qu'une porte fermée puisse être rouverte, ou bien même défoncée. Soit. Il faudrait alors qu'on m'explique comment traiter les versets très clairement violents, qui à eux seuls sont plus de 120, les versets antisémites, antichrétiens, racistes, esclavagistes, misogynes, homophobes, etc? Et comment s'en sortir avec le verset qui légalise la pédophilie?
Les "pratiques réelles" des tribunaux islamiques ne pourront jamais aller à l'encontre d'un verset, ce serait une hérésie, punissable de mort.
Dans le même chapitre, Daniel Pipes parle de charia "atténuée pour en faire un code de loi opérationnel", il pense que l'islam est capable de "flexibilité". C'est pour le moins d'une naïveté infantile. En même temps, il admet implicitement que l'ensemble de la loi coranique, la charia, est d'essence anti-humaine, et que cet ensemble a besoin d'être "adapté" pour pouvoir présenter un caractère simplement acceptable. Ce qui reviendrait à dire qu'il y a un ver dans le fruit "islam", qu'il suffit juste de l'extirper pour en faire un dogme convenable. Que fait-on alors des 2 versets qui demandent aux musulmans de n'avoir aucun répit sur terre tant que "la religion ne soit pas entièrement à Allah"? Le ver dans le fruit "islam" c'est le coran, ce n'est ni la tradition, ni les hadith ou l'imitation des enseignements de la sira an-Nabawiya. Ce qui revient à dire que s'il ne s'agit que d'un ver dans un fruit, le ver c'est l'islam et le fruit c'est l'humanité libre.
Ceux qui ont fait des efforts dans le sens voulu par Daniel Pipes se sont écartés de l'islam et l'on remisé au second plan. Il s'agit de Bourguiba et d'Ataturk. Daniel Pipes omet de dire que, s'ils ont réussi leur réformes, c'est simplement parce qu'ils ont interdit à l'islam de s'exprimer ailleurs que dans mes mosquées et qu'ils ont imposé leurs principes par la dictature! Et que les principes ataviques de l'islam reviennent au goût du jour dès qu'on lui redonne la moindre liberté. Ataturk voyait dans l'islam en général et dans le coran en particulier un frein au développement de son pays. Daniel Pipes cite comme modèle "d'islamisme" (c'est son mot) moderne le premier ministre actuel de la Turquie, on croit rêver! La Turquie antichrétienne et antisémite, la Turquie des mariages forcés, la Turquie championne du monde des crimes d'honneur (titre partagé avec la Jordanie), la Turqui qui persécute des composantes de son Histoire, notamment les Kurdes et les chrétiens, la Turquie dont Mein Kampf est best-seller juste derrière le coran, la Turquie négatrice du génocide arménien, devient non seulement fréquentable, mais un modèle à suivre!
Enfin, dans sa "synthèse moderne", Daniel Pipes parle de l'accord des 3 monothéismes de ne plus accepter le travail forcé: cela n'a pas été très dur pour les musulmans car le coran n'est pas explicite sur le sujet.
Il cite d'autres exemples. De faux exemples: que ce soit la question de l'esclavage, de la finance islamique, de la pédophilie, qu'il baptise pudiquement "mariage d'enfants", il ne s'agit pour tous ces cas que d'hypocrisie: on déguise les faits, on leur met des habits "convenables", mais le fonds reste le même. Demandez donc aux 57 pays membres de l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI) s'ils ont intégré dans leurs Constitutions respectives l'abolition de l'esclavage!
Quant au débat sur la contestation du sort réservé aux apostats, là encore les dés musulmans sont pipés à l'avance: toute conclusion à laquelle on aboutira sera "conforme" au coran, puisqu'il ne préconise aucune sanction contre eux.
Mis à part peut-être la condamnation de la clitoridectomie, que le coran n'aborde pas, toutes ces concessions faites dans le but de se rapprocher -d'infiltrer - l'Occident ne peuvent être acceptables à longue échéance par les musulmans.
Un question essentielle subsiste: que fait-on des autres principes, autrement plus cruciaux, comme la place de la femme, l'antisémitisme, la peine de mort requise systématiquement contre tous les humains qui n'ont pas adopté une des 3 religions "abrahamiques", et bien d'autres sujets remettant en cause très directement les principes issus de la Déclaration des Droits Humains de 1948? Là encore, le mieux serait de demander aux 57 pays signataires de la Charte de l'Organisation de la Conférence Islamique.
Un dernier point: si la réforme du coran était possible, pourquoi les versets abrogés (mansukh) sont malgré tout conservés? Les supprimer aurait le mérite de clarifier le dogme, dans tous les domaines. Ainsi, concernant l'interdit de l'alcool et du vin, les 3 versets suivants seront effacés du coran:
- Des fruits des palmiers et des vignes, vous retirez une boisson enivrante et un aliment excellent. Il y a vraiment là un signe pour des gens qui raisonnent (16:67).
- Ils t'interrogent sur le vin et les jeux de hasard. Dis : "Dans les deux il y a un grand péché et quelques avantages pour les gens; mais dans les deux, le péché est plus grand que l'utilité". Et ils t'interrogent : "Que doit-on dépenser (en charité)? " Dis : " L'excédent de vos bien." Ainsi, Allah vous explique Ses versets afin que vous méditez (2:219).
- Ô les croyants! N'approchez pas de la Salat alors que vous êtes ivres, jusqu'à ce que vous compreniez ce que vous dites, et aussi quand vous êtes en état d'impureté [pollués] - à moins que vous ne soyez en voyage - jusqu'à ce que vous ayez pris un bain rituel. Si vous êtes malades ou en voyage, ou
si l'un de vous revient du lieu où il a fait ses besoins, ou si vous avez touché à des femmes et vous ne trouviez pas d'eau, alors recourez à une terre pure, et passez-vous-en sur vos visages et sur vos mains. Allah, en vérité est Indulgent et Pardonneur (4:43) .
Pour ne conserver que le dernier chronologiquement "révélé":
- Ô les croyants! Le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées, les flèches de divination ne sont qu'une
abomination, oeuvre du Diable. Écartez-vous en, afin que vous réussissiez (5.90).
Les musulmans sont-ils prêts à le faire? Je réponds catégoriquement: non. A cause de la "parole incréée": les supprimer serait reconnaître que leur livre sacré n'a rien de tel. Et également, de manière plus sournoise, conserver les versets nasikh est bien utile à leur propagande.
Nota: j'ai apprécié à sa juste valeur l'expression "les non-musulmans devraient soutenir les anti-islamistes modérés". A mourir de rire, si les circonstances n'étaient pas dramatiques: où sont donc ces représentants de cet islam à visage humain? En avez-vous vu ou entendu ces derniers temps? Moi, pas!
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